L’Association Internationale de Sécurité Sociale (AISS) en collaboration avec la Caisse Nationale de Sécurité Sociale de la République du Congo (CNSS) a organisé du 4 au 5 août 2022 à Brazzaville (République du Congo), un séminaire technique sous-régional sur le thème : « La protection sociale des travailleurs migrants en Afrique Centrale ». Ce séminaire s’est inscrit dans le but d’échanger sur les bonnes pratiques permettant d’accroître, d’améliorer et de renforcer les capacités et les performances des institutions de sécurité sociale et également analyser le cadre juridique existant et à proposer des mécanismes bilatéraux ou multilatéraux pertinents, à même de répondre à la problématique de la gestion de la carrière et des droits sociaux des travailleurs migrants dans la sous-région.

Les participants, responsables des institutions de prévoyance sociale de la Tunisie, de la République du Congo, de la République Démocratique du Congo (RDC) , de la République Centrafricaine (RCA), du du Gabon, du Cameroun, du Tchad, des Comores ont débattu durant deux (02) jours sur la problématique afin de répondre à quelques interrogations. Parmi lesquelles : Quelle est la situation actuelle des travailleurs migrants au niveau de votre pays ? Existe-t-il des conventions multilatérales ou bilatérales dans le cadre de la protection sociale des travailleurs migrants ? Quelles sont les perspectives de signature de telles conventions avec d’autres Etats d’Afrique Centrale ? Quels sont les autres défis et contraintes que rencontre votre pays où votre institution dans ses efforts pour la prise en charge des travailleurs migrants ? Quelles sont vos préconisations pour parvenir à une prise en charge efficiente des travailleurs migrants ?

A l’ouverture de ce séminaire, Jean Rosaire IBARA, Ministre du Contrôle d’Etat, de la Qualité du service et de lutte contre les antivaleurs dans l’administration publique, a rappelé, au nom du Ministre d’Etat, Ministre de la Fonction Publique, du Travail et de la Sécurité Sociale en mission, Firmin AYESSA, qu’ « il s’agit, pour nos institutions de protection sociale de réfléchir en vue de se doter d’instruments efficients face aux défis de la portabilité des droits sociaux et de la prise en charge effective des travailleurs migrants et de leur famille. Cette démarche qui nous réjouit tous devrait se réaliser à la lumière des instruments adoptés au niveau international et régional, qui pour l’essentiel, n’attendent que mise en application pour soulager les souffrances des travailleurs migrants ».

Pour le DG de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS) du Congo, Evariste ONDONGO, ce thème place la gestion de la carrière des travailleurs migrants, de la problématique de la portabilité de leurs droits sociaux au cœur des préoccupations et au centre des défis de nos institutions se doivent de relever. « Il témoigne également l’engagement de l’AISS aux côtés des organismes de sécurité sociale, membres de cette institution internationale, à développer et à promouvoir l’excellence dans tous les domaines grâce à des améliorations techniques et administratives permanentes et continues dans la prise en charge des assurés sans distinction de nationalité », a-t-il dit avant de féliciter, à cet effet, le Dr Jean-Simon MFUTI KIAKU, Président du Comité Directeur du BLAISAC et Directeur Général de la CNSS-RDC.

Ce qui du reste signifie que le thème choisi, a estimé le Secrétaire Général de l’Association Internationale de Sécurité Sociale(AISS), Marcelo Abi-RAMIA CAETANO est d’un intérêt particulier dans la mesure où il poursuit les réflexions engagées dans le cadre du dernier séminaire technique organisé à Kinshasa sur l’extension de la couverture sociale aux populations non encore couvertes. « Il y a sans doute des efforts à fournir, des expériences à capitaliser, de la volonté politique à mettre en œuvre pour braver les obstacles liés à la mise en œuvre des accords bilatéraux ou multilatéraux’ préalable nécessaire à la prise en charge efficiente de travailleurs migrants » , a-t-il précisé.

Outre, les questions qui ont fait l’objet de discussions sous forme de tables-rondes et travaux en groupe, une présentation des expériences de chaque pays a été aussi faite. Il s’agit : « Rappel des termes de référence et bref aperçu des actions menées par l’AISS dans le cadre des efforts visant la couverture sociale des travailleurs migrants » par M. Tiguy ELEBE MOTINGIYA, Officier de Liaison du BLAISAC ; « Diagnostic des pays sur la question des travailleurs migrants ainsi que la présentation des dispositifs de protection sociale entre Etats » par M. Stani ONDZE, Conseiller aux relations internationales et aux droits humains du Ministre d’Etat, Ministre chargé de la Sécurité sociale ; « Expérience de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale de la RCA » par M. Richard KWANGBO-GUDA,DG de la CNSS RCA ; « Expérience de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale du Cameroun » par M. Noël Alain-Olivier MEKULU MVONDO AKAME, DG de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale du Cameroun (CNPS-Cameroun) ; « Expérience de la Caisse des Pensions et des Prestations Familiales des Agents de l’Etat du Gabon » par M. Sorel ONGOLO, DG de la Caisse des Pensions et des Prestations Familiales des Agents de l’Etat (CPPF-Gabon) ; « Expérience de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale/RDC » par le Dr Jean Simon MFUTI KIAKU, DG de la CNSS-RDC ; « Expérience de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale du Congo » par M. Evariste ONDONGO, DG de la CNSS-Congo ; « Défis et contraintes des dispositifs de protection sociale et de préconisations pour une meilleure couverture des travailleurs migrants : cas de l’Afrique du Nord » par M. Tarek LAKHDAR, Directeur Adjoint à la Direction de la Coopération et des relations internationales de la CNSS-Tunisie ; « Expérience de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et Garantie Sociale de la République Gabonaise » par M. Séverin ANGUILE, DG de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale (CNAMGS) ; « Expérience de la Mutuelle de Santé des Enseignants de la RDC » par Mme Cécile TSHIYOMBO, Secrétaire exécutif de la Mutuelle de Santé des Enseignants du Congo (MESP-RDC).

A l’issue des travaux, les participants ont constaté la faible volonté des Etats à appliquer ou à conclure des conventions de sécurité sociale, et que la plupart des pays de la sous-région, malgré la ratification de la Convention multilatérale de la sécurité sociale, tardent encore à l’appliquer, bien que conformément aux dispositions de l’article 49 de ladite Convention, celle-ci est applicable entre deux Etats dès lors que les instruments de ratification desdits Etats ont été déposés, etc. D’où l’importance, pour eux, d’avoir formulé des recommandations à savoir :

  • Sensibiliser les États membres du BLAISAC qui ne l’ont pas encore fait, à ratifier la Convention multilatérale de la sécurité sociale de la Conférence Interafricaine de la Prévoyance Sociale, en vue d’uniformiser et d’harmoniser le cadre législatif concourant à une portabilité des cotisations sociales, à la prise en compte des droits acquis et une prise en charge du travailleur et de leurs ayants-droits ;
  • Senbiliser les Etats membres du BLAISAC ayant déjà ratifié la Convention multilatérale de la sécurité sociale de la Conférence Interafricaine de Prévoyance Sociale, à mettre en place de arrangements administratifs qui permettront une protection sociale des travailleurs migrants ;
  • Encourager les Etats membres non parties à la Convention multilatérale de la sécurité sociale de la CIPRES à conclure des conventions bilatérales;
  • favoriser les réunions et partages d’informations entre Experts des caisses membres du BLAISAC afin de dresser l’état des lieux de la situation des travailleurs migrants de chaque pays et ainsi, proposer des avant-projets susceptibles de faciliter le processus de négociations officielles, préalables à la signature des accords ou Conventions de sécurité sociale;
  • Mettre en œuvre au niveau de chaque Etat du socle juridique de la CIPRES pour faciliter l’harmonisation des législations;
  • Ratifier les instruments pertinents de l’OIT;
  • Réécrire l’article 54 de la Convention multilatérale de la CIPRES ;
  • Encourager les Etats ayant ratifié la Convention multilatérale CIPRES à s’approprier les arrangements administratifs annexés à la Convention multilatérale afin de régler les questions techniques entre les caisses notamment le transfert de fonds et le calcul des périodes d’assurance, etc.

« Au moment où c’est s’éteignent les lampions de notre séminaire sous-régionale, qu’il me soit permis de rappeler la volonté commune d’inscrire Brazzaville comme point de départ de l’appropriation des conditions de protection sociale des travailleurs migrants en Afrique Centrale, promues par l’Association Internationale de Sécurité Sociale, notre organisation supranationale. Je suis convaincu qu’au travers de vos échanges, nos Etats en général, nos organismes et institutions de sécurité sociale en particulier, prennent un véritable engagement pour donner, à notre espace géographique, les chances de redynamisation de nos politiques sociales » , a conclu Christian ABOKE NDZA, Directeur de cabinet du Ministre d’Etat en charge de la Fonction Publique, du Travail et de la Sécurité Sociale, encourageant les participants à « persévérer dans cet élan de quête de solutions africaines durables et inclusives ».

Fondée en 1927 sous l’égide de l’Organisation internationale du Travail, l’AISS compte aujourd’hui plus de 320 institutions membres dans plus de 120 pays.